2 | MADAME BEAU SOLEIL |
Les eaux dormantes ne font pas les plus saines, et la vertu se trouve pour le moins aussi souvent dans un esprit libre, que parmi ces ?mes retenues, qu'on a droit de soup?onner d'hypocrisie, mais c'est une erreur o? tombe presque tout le monde, pour ce qui regarde les femmes de notre profession, car ils pensent que la farce est l'image de notre vie, et que nous ne faisons que repr?senter ce que nous pratiquons en effet, ils croient que la femme d'un de vous autres, l'est indubitablement de toute la troupe ; et s'imaginant que nous sommes un bien commun, comme le Soleil ou les ?l?ments, il ne s'en trouve pas un, qui ne crois avoir droit de nous faire souffrir l'importunit? de ses demandes, et certes c'est bien de l? que proc?de la plus f?cheuse chose, qui s'?prouve ? notre condition : car comme nos chambres tiennent des temples, en ce quelles sont ouvertes ? chacun, pour un honn?te homme qui nous y visite, il nous faut endurer les impertinences, de mille qui ne le sont pas, l'un viendra branler les jambes toute une apr?s-d?n?e sur un coffre sans dire mot, seulement pour nous montrer qu'il a des moustaches, et qu'il les sait relever, l'autre un peu moins r?veur que celui-ci, mais non pas plus habile homme, fera toute sa conversation de bagatelles, aussi peu consid?rables que son esprit : et tranchant de l'officieux, il voudra placer une mouche sur la gorge, mais c'est ? dessein d'y toucher : il voudra tenir le miroir, attacher un noeud, mettre de la poudre aux cheveux, et prenant sujet de parler de toutes ces choses, il le fait avec des pointes aussi nouvelles, et aussi peu communes que la Guimbarde, ou Lanturlu. |
Acte 2, sc. 3, MADAME BEAU SOLEIL, phrase 1 |