******************************************************** DC.Title = DE LA CONTRARIÉTÉ, CONVERSATION. DC.Author = BARY, René DC.Creator = FIEVRE, Paul DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Subject = Dialogue DC.Subject.Classification = 842 DC.Description = Edition du texte cité en titre DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Contributor = DC.Date.Issued content = DC.Date.Created = DC.Date.Modified = Version du texte du 31/12/2023 à 13:36:26. DC.Coverage = France DC.Type = text DC.Format = text/txt DC.Identifier = http://www.theatre-classique.fr/pages/documents/BARY_CONTRARIETE.xml DC.Source = https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1097097 DC.Source.cote = BnF LLA Z-20072 DC.Language scheme = UTF-8 content=fr DC.Rights = Théâtre Classique, (creative commons CC BY-NC-ND) *************************************************************** DE LA CONTRARIÉTÉ CONVERSATION IV XCVIII. AVEC PRIVILÈGE DU ROI. PAR RENÉ BARY, Conseiller et Historiographe du Roi. Achevé d'imprimer pour la première foi le 24 jour de mars 1662. Les exemplaires ont été fournis ACTEUR. EBENE. LYSETE. Texte extrait de "L'esprit de cour, ou Les conversations galantes, divisées en cent dialogues, dédiées au Roi.", René Bary, Paris : de C. de Sercy, 1662. pp 22-27. DE LA CONTRARIÉTÉ. Une grande dame déclare à une de ses amies, qu'elle ne peut souffrir qu'en lui donne de l'encens. LYSETE. Je ne puis voir de bon air ceux qui admirent tout ce que je dis. EBENE. De tous les poisons je n'en connais point de si redoutables que celui qui entre par l'oreille. LYSETE. En effet, le venin du coeur est moins dangereux que celui de l'âme. EBENE. Pour vous, Madame, il est malaisé de vous en faire accroire ; la connaissance de soi-même est une de vos études. LYSETE. Quelque connaissance qu'on ait de sa supériorité, il est toujours à craindre qu'à force d'entendre des flatteries, l'on ne se flatte. EBENE. L'on ne dit rien qui soit au dessus de votre mérite, lors qu'on dit que vous méritez beaucoup ; la vérité pour vous n'a rien que de beau ; de l'on ferait mal votre portrait, si l'on ne le faisait ravissant. LYSETE. Vraiment je suis bien malheureuse, je trouve en vue personne que j'aime, ce que je n'aime point. EBENE. Que dis-je qui puisse vous déplaire ? LYSETE. Que dites-vous qui puisse m'agréer ? EBENE. Je dis de vous, Madame, ce que tout le monde en pense ; et si vous entendiez tout ce qu'il en dit, vos oreille sauraient cent fois plus d'occupation que vos yeux. LYSETE. Je ne doute point que je n'aie quelque qualité considérable ; si je n'en avais point, vous ne prendriez pas la peine de me débiter des fleurettes : Mais quelle proportion y a-t-il entre l'état que vous faites de ma personne, et le simple état que vous en devriez faire ? EBENE. Si je péchais contre cette proportion, pourquoi commettrais-je ce péché ? Ne sais-je pas que vous savez distinguer ceux qui vous cajolent d'avecque ceux qui ne vous cajolent point ? Et que la flatterie qui entrerait dans vos oreilles, n'entrerait pas dans votre créance ? LYSETE. Quand vous seriez innocente du crime dont je vous accuse, les vérités dont vous m'entretiendriez ne seraient comme à charge : La raison est, que la contestation réveille le génie, que l'opposition échauffe la veine, et que de la contrariété des sentiments naissent quelquefois les plus beaux rayons du monde. EBENE. Comme les gens de votre force sortent toujours des jeux de l'esprit avecque beaucoup de succès, il ne faut pas s'étonner s'il n'y a presque personne qui ose vous livrer chance. LYSETE. Je n'aime les combats spirituels que parce que j'aime les conversations utiles : Tout le raisonnement humain n'est pas dans une tête ; Les matières les plus stériles ont diverses faces ; Nous les regardons d'un coté, et notre adversaire les regarde d'un autre. EBENE. Il est vrai que quelque belle que soit la vérité, il y a quelquefois grand plaisir à la contredire : Mais qui entreprendrait de la choquer devant vous ? Sortirait-on à son honneur d'un combat si inégal ? La vérité serait-elle faible dans votre bouche? Tairiez-vous son parti ? Abandonneriez-vous ces intérêts ? LYSETE. Quoi, vous louerez toujours les gens ? Hé ! De quelle humeur êtes-vous ? Vraiment si vous n'adoucissiez l'excès de vos éloges par les charmes de votre éloquence, vous n'auriez pas en personne un auditeur bien attentif. EBENE. C'est ici, Madame, qu'on peut dire qu'une langue éloquente loue une langue indiserte. LYSETE. Si j'avais l'art du bien dire, j'aurais l'art de la persuasion ; vous vous déferiez de vos erreurs, et vous embrasseriez mes sentiments EBENE. Il est impossible de persuader les faussetés évidentes ; L'art a ses bornes, et la vérité a ses convictions. ==================================================