******************************************************** DC.Title = LA BONNE FEME, Parodie de l'opéra d'Hypermnestre DC.Author = BIANCOLELLI, ROMAGNESI DC.Creator = FIEVRE, Paul DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Subject = Parodie DC.Subject.Classification = 842 DC.Description = Edition du texte cité en titre DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Contributor = DC.Date.Issued content = DC.Date.Created = DC.Date.Modified = Version du texte du 28/12/2020 à 13:02:43. DC.Coverage = Egypte DC.Type = text DC.Format = text/txt DC.Identifier = http://www.theatre-classique.fr/pages/documents/BIANCOLLELLIROMAGNESI_BONNEFEMME.xml DC.Source = http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k81680 DC.Source.cote = DC.Language scheme = UTF-8 content=fr DC.Rights = Théâtre Classique, (creative commons CC BY-NC-ND) *************************************************************** LA BONNE FEMME Parodie de l'opéra d'Hypermnestre M. DCC. XXXVIII. Avec Approbation et Privilège du Roi. Par les sieurs DOMINIQUE et ROMAGNESI, comédiens du Roi. À PARIS. Chez BRIASSON, rue Saint-Jacques, à la Science. Représentée pour la première fois sur le théâtre de l'Hôtel de Bourgogne, par les Comédiens italiens ordinaires du Roi, le 10 août 1726. ACTEURS DANAÜS. HYPERMNESTRE. LYNCÉE. ARCAS. L'OMBRE DE GÉLANOR. LE GRAND PRÊTRE d'ISIS. UN PAYSAN. CHOEUR d'ÉGYPTIENS. CHOEUR d'ARGIENS. DANSEUSES EN MATELOTS ET MATELOTES. UNE MATELOTE. LA BONNE FEMME. Le théâtre représente plusieurs tombeaux, et au milieu le mausolée de Gélanor, Roi d'Argos. On voit dans la perspective le soleil qui s'élève peu à peu. Paru dans les "Parodies du Nouveau théâtre italien ou recueil des parodies représentées sur le théâtre de l'Hotel de Bourgogne, par les Comédiens Italiens Ordinaires du Roi, avec les airs gravés. Nouvelle édition, revue et corrigée et augmentée de plusieurs Parodies. Tome Quatrième". pp. 37-72 ACTE UNIQUE SCÈNE I. Danaüs, Arcas. ARCAS. Air : Sais-tu la différenceDeux illustres familles,Apaisent leur courroux,Tuchoux ;Et vos cinquante fillesTrouvent cinquante époux, Tuchoux,[Note : Drille : Méchant soldat. Il ne se dit que par mépris et par raillerie. Se dit aussi de tout autre malheureux qui porte l'épée, quoiqu'il ne soit point enrôlé. [F]]Tous Princes et bons drilles,Tuchoux,Ah, quel bonheur pour vous !Que ce jour est heureux ! DANAÜS. Air : Je jure par tes yeux.Pas tant que tu le dis. Pas tant que tu le dis.Un frère chicaneur me chassa de Memphis,Et me force en ces lieux à couronner ses fils. ARCAS. Ne sont-ils pas vos neveux ? DANAÜS Oui. ARCAS. Par conséquent, vos filles sont leurs cousines ? DANAÜS. Hé bien. ARCAS. Hé bien. Fin de l'air : Compère et commèreCousins et cousinesSont faits pour s'aimer, Et pour s'entre-couronner.Mais, Seigneur, si cette alliance vous faisait tant de peine, que ne refusiez-vous la paix ? DANAÜS. Air : Pierre Bagnolet.Pouvais-je soutenir la guerre,Et ne sais-tu pas comme moi,Que la moitié de la terreD'Égyptus reconnaît la loi ? Voilà pourquoi,bisJe n'ai pu soutenir la guerre,Parce qu'il est plus fort que moi.Il a plus de soldats que je n'ai de sujets, et quels sujets ! Air : Quand la bergère vient des champs.Ils se ressouviennent encorDe Gélanor. ARCAS. Ils ont grand tort.Ne savent-ils pas qu'il est mort,Et que tout ombreDu palais sombreJamais ne sort. DANAÜS. Oui, mais c'est moi qui l'ai tué. ARCAS. Bon, ne fallait-il pas toujours qu'il mourut ? Mais on vient... SCÈNE II. Hypermnestre, Danaüs. HYPERMNESTRE. Air : Pourquoi vous en prendre à moi.À quoi vous amusez-vous,Mon père, mon père ?Nous attendons nos époux,Est-ce dans un cimetièreQu'on forme des noeuds si doux ? À quoi, etc.Venez, venez, fuyez ces lieux tristes, et lugubres qui redoublent votre peine. DANAÜS. Air : Sois complaisant, affable, débonnaire.D'un doux regardLe ciel nous favorise,Mais de sa partJe crains encor la crise. CarQuand on fait une sottise,On la paye tôt ou tard. HYPERMNESTRE. N'ayez aucune peur. Air : Que je chéris mon cher voisin.De vos neveux la quantité,La valeur, l'alliance, Du trône où vous êtes montéAffermit la puissance.Songez qu'ils sont cinquante, quoiqu'on n'en parle point à l'Opéra. Air : Allons gai.Par un destin prospère,Avant qu'il soit deux ans,Vous vous verrez grand-père D'un régiment d'enfants.Allons gai, d'un air gai, toujours gai. DANAÜS. J'attends mes gendres avec impatience. J'ai promis Lyncée à votre amour, je vous tiendrai parole. HYPERMNESTRE. Il parut ici par l'ordre d'Égyptus ; vous me vantâtes son mérite, et vous m'ordonnâtes de l'aimer, je ne balançai pas un moment à exécuter vos ordres. Air : Quand le péril est agréable.Mon soin d'abord fut de lui plaire,Il fut l'objet de mes amours,Car une fille doit toujours Obéir à son père.Mais quand je vous vois si fort enseveli dans la tristesse, est-il quelque bonheur pour moi ? DANAÜS. Oh, ma foi, je n'ai pas envie de rire. HYPERMNESTRE. Quel nouveau chagrin peut encore vous agiter ? Air : Diablezot.Ma fille j'ai vu cette nuitDe Gélanor l'ombre implacable,Dans ma chambre il a fait grand bruit,D'une voix rauque et formidable, Arrête, arrête, m'a-t-il dit. HYPERMNESTRE. Croyez-vous que Pluton renvoieLes morts qu'il tient dans son cachot ?L'Achéron lâche-t-il sa proie ?Diable zot. DANAÜS. Ce n'est pas là tout, écoutez le reste. Air : L'autre nuit j'aperçus en songe.Les dieux l'ont armé de la foudre,Soigneux de venger son trépas.J'ai vu mon trône en mille éclats,Et mon palais réduit en poudre. HYPERMNESTRE. Ah ! Vos songes sont trop mauvais, Puissiez-vous ne rêver jamais. DANAÜS. Air : La Serrure.Je vais lui donner une fête,Ce spectacle sera nouveau.Allons, enfants, que l'on s'apprêteÀ l'amuser dans son tombeau. HYPERMNESTRE. Air : Ami, qui l'aurait pu croire.Mon père, pouvez-vous direQu'on aime à rireChez les morts ? DANAÜS. Ma fille, retirez-vous, et laissez-moi. HYPERMNESTRE, en s'en allant. En vérité, le bonhomme radote ! SCÈNE III. Marche des danseurs, en longs manteaux noirs et crêpes, qui portent des plats devant le tombeau de Gélanor. Après qu'on a dansé. DANAÜS. Air : Ô reguingué.Ombre d'un Prince infortunéQue j'ai moi-même assassiné, Ô reguingué, ô lon lan la,Soyons amis, plus de querelle,Pardonne cette bagatelle. Fin de l'air : Revenant de Lorette.Honorez,Célébrez, Et sa gloireEt sa mémoire.Que nos jeux, que nos chantsLui fassent passer le temps. LE CHOEUR. Honorons, Célébrons,Et sa gloireEt sa mémoire.Que nos jeux, que nos chantsLui fassent passer le temps. Après les danses, le soleil s'éclipse, la terre tremble. UN DU CHOEUR. Air : Je ne suis né ni roi, ni prince.Le jour pâlit ! la terre tremble !Quel pouvoir contre nous rassemble,Et confond tous les éléments ?Quels sifflements ! L'ombre cruelleReçoit nos divertissements Tout comme une pièce nouvelle. Tout le peuple fuit. L'ombre de Gélanor sort de son tombeau. L'OMBRE. Air : Or écoutez petits et grands.Tous tes regrets sont superflus,Bientôt un des fils d'Égyptus,Pour me venger de ton audace,Tyran, va régner en ta place. Mon sang fut répandu par toi,Il versera le tien pour moi. DANAÜS. Air : On vous en ratisse.Que mon coeur est agité !Ah ! par cette obscurité,Tu redoubles mon supplice, Dis-moi donc qui me tuera. L'OMBRE, en rentrant dans son tombeau. On vous en ratisse, tisse, tisse,On vous en ratissera. DANAÜS. Air : Comment faire.Ombre inhumaine expliquez-vous,Sur qui doivent tomber mes coups ? Dans une telle pépinière,Il s'agit de développerCelui que ma main doit frapper,Comment faire ? Air : Quand je tiens de ce jus d'octobreVoyez la plaisante vétille, Je n'ai pour sortir d'embarrasQu'à tuer toute la famille,Et je ne m'y tromperai pas. SCÈNE IV. HYPERMNESTRE, seule. Le théâtre change, et représente une mer agitée. Air : Sortez de vos retraites.Ah ! quel affreux orage,Cessez vents furieux D'exercer votre rageSur l'objet de mes feux.Dans vos grottes profondesRentrez en ce moment,Doux Zéphirs sur les ondes, Conduisez mon amant.Que je suis heureuse ! La tempête cesse. Air.Le temps est calme, et le vent doux,Dépêchez-vous,Mon cher époux.L'Hymen nous attend au port, Pour vous y faire un heureux sort.Ce dieu dans ce jourD'accord avec l'AmourVa couronner l'ardeur qui nous presse,Faisons sur ces bords, Éclater nos transports,Et que nos tendres désirs,Comblés par les plaisirs,Dans nos coeurs renaissent sans cesse. SCÈNE V. Hypermnestre, troupe de matelots et matelotes HYPERMNESTRE. Air : Y avance, y avance.Viens promptement, jeune héros, Hâte-toi, traverse les flots,L'Amour veut de la diligence. LE CHOEUR DES MATELOTS. Y avance, avance,Réponds à son impatience. HYPERMNESTRE. Que ne vous dois-je point, mes chers enfants ? Voilà ce qui s'appelle être bien secondée. Lyncée ne peut manquer d'arriver lorsque tout un peuple l'appelle... Mais n'est-ce pas lui que j'aperçois... Ô ciel ! En quel état s'offre-t-il à mes yeux ? SCÈNE VI. Lyncée, les acteurs de la scène précédente. On voit Lyncée qui traverse les flots à la nage, il est en chemise. LYNCÉE. Air : Ça du vin, mettons-nous en train.Ça Fanchon, Mon petit bouchon,Ça ma chèreFaites faireDu feu car j'ai le frisson. HYPERMNESTRE. Cher époux Je tremblais pour vous. LYNCÉE. Des poissons l'humide canaille,Les huitres à l'écaille,De moi tout était jaloux.Mais enfin, L'Amour bien plus finM'a malgré l'orage,Conduit à la plage,Je promets...De n'en dériver jamais. HYPERMNESTRE. Air : Ma fable est-elle obscure lure lure.Tout parle ici de votre amour extrême,Mon tendre coeur n'a rien à désirer. LYNCÉE. De vous aimer je fais mon bien suprême,De mon ardeur tout doit vous assurer. HYPERMNESTRE. Mon cher amant, croyez-vous qu'elle dure ? Lure, lure, lure.Oh ! sans doute, elle dureraAutant qu'à l'Opéra. HYPERMNESTRE et LYNCÉE, ensemble. Air : Par bonheur ou par malheur.Sort heureux, aimable jour,Vous augmentez mon amour En finissant mes alarmes. LE CHOEUR. Sort heureux, aimable jour. LYNCÉE. Oh ! Finissez, s'il vous plaît, vous m'étourdissez. J'ai bien autre chose à faire que de vous entendre brailler, allons chercher le Roi, mon futur beau-père. HYPERMNESTRE. Air : Je n'aimerai jamais que vous.Déjà vos frères et mes soeursSe jurent dans le templeLes plus sincères ardeurs, Suivons leur exemple. LYNCÉE. Cessons d'inutiles discours,Nous n'avancerons rien si nous chantons toujours.Venez, Princesse mes amours,Venez au temple. SCÈNE VII. Danaüs, Hypermnestre, Lyncée. DANAÜS. Ah ! Mon gendre vous voilà ? Soyez le bien venu : vous avez bien tardé. Air : Laire laire laire.Vos frères plus impatientsN'ont pas attendu si longtemps,Ils ont déjà conclu l'affaire,Laire, laire, laire, etc. LYNCÉE. Malepeste ! Ils étaient bien pressés. Air : Un amant avec ce qu'il aime.Beau-père, on ne doit pas si vite Prononcer ce funeste mot,Car le mariage est un gîteOù l'on n'arrive que trop tôt. DANAÜS. Air : Quel plaisir d'aimer sans contrainte.Au temple l'Hymen vous appelle. HYPERMNESTRE, à Lyncée. Entrez-y donc. LYNCÉE. Je vous suis, ma belle. DANAÜS. Tout est prêt pour la cérémonie. LYNCÉE. Oh ! point de façon, je vous en prie. SCÈNE VIII. Le grand prêtre, ministres, et prêtresses. Le théâtre change et représente le temple d'Isis avec la statue de cette déesse. Après la danse, Danaüs, Hypermnestre, Lyncée, arrivent. LE GRAND PRÊTRE. Air : J'offre ici mon savoir faire.Sur cet autel qu'on révère,Isis recevez les serments,Que toujours y font les amants, Et plus souvent ne tiennent guère. LE CHOEUR. Que toujours, etc. On approche l'autel de l'Hymen où Hypermnestre et Lyncée posent la main, le grand prêtre reçoit leur serment. HYPERMNESTRE. Air : Amis sans scrupuleDe ma vive flammeHymen soit le garant. LYNCÉE. Je jure à ma femme D'être toujours constant. HYPERMNESTRE. Je vous serai fidèle,J'en fais, cher amant,Le serment. LYNCÉE. Hélas, ma belle, L'Amour le fait, mais l'Hymen le dément. DANAÜS. Allons, qu'on ouvre les portes du temple, et que tout le monde y entre pèle-mêle. SCÈNE IX. Les acteurs de la scène précédente, paysans, paysannes qui entrent dans le temple. UN PAYSAN. Air : Gai, gai, gai, Madame la mariée.Gai, gai, gai,Madame la mariée.Bon, bon,Je sommes ravis tatigué, De vous voir si bien accouplée. LE CHOEUR. Gai, gai, gai. On danse. UNE BERGÈRE. Air : Menuet d'HypermnestreÀ l'Amour,En ce jour,Rendons tous hommage. Quelle douceur !Quand ce vainqueurNous engage,Livrons-nousÀ ses coups. Jeunes coeurs hâtez-vous,Il ne veut votre encensQue dans vos beaux ans. On danse. SCÈNE X. Arcas, les susdits. ARCAS. Air : Lanturlu.Que votre présencecalme les mutins, Voyez l'insolenceDe tous ces coquins.Pendant que l'on danseIls nous rossent tant et plus,Lanturlu, lanturlu, lanturlu. DANAÜS. Air : Talaleri, talaleri, talalerire.Sur moi leur injuste vengeancePoursuit le sang de Gélanor,Mais c'est en vain que ma clémenceVoudrait les épargner encor.Ah ! morbleu, nous allons bien rire Talaleri, talaleri, talalerire. LYNCÉE. Air : Ce n'est point par effort qu'on aime.De vous, que j'obtienne une grâce,Souffrez qu'en cette occasion,Sur cette vile populace,Je fasse une belle action. DANAÜS. Allez donc vous battre à ma place. LYNCÉE, en s'en allant. Le beau-père est un peu poltron. SCÈNE XI. Danaüs, Hypermnestre. DANAÜS. Sortez tous, et vous ma fille demeurez. À part.Je ne sais comment elle recevra le beau compliment que je vais lui faire. Air : Mais surtout prenez bien garde.Quoique les liens les plus douxVous attachent à votre époux,Vous devez votre affection À votre cher papa mignon. HYPERMNESTRE. Vraiment, je le sais mon père. DANAÜS. Écoutez-moi donc. (bis) Air : Que je chéris, mon cher voisinMa fille, l'on a résoluD'immoler votre père. J'ai besoin de votre vertu. HYPERMNESTRE. Et qu'en voulez-vous faire ? DANAÜS. Elle doit armer votre bras. HYPERMNESTRE. Air : Le beau berger Tircis.Sachons sur qui je doisExercer mon courage.Sans différer nommez-moi L'ennemi qui vous outrage. DANAÜS. Son nom seul va, je gage,Glacer ton coeur d'effroi. HYPERMNESTRE. Air : Dedans nos bois il y a un ermite.Quoi ! Vous pouvez soupçonner ma faiblesse ?Seigneur, si du serment Que dans ce jour j'ai fait à la déesse,Vous n'êtes pas content,Pour vous prouver mon amitié sincère,Je vais encor faire, Moi Je vais encor faire. DANAÜS. Air : Ah ! qu'il est beau l'oiseau.À vous parler sincèrement, (bis)Je crains que le second sermentN'ennuie, n'ennuie.Jamais on en fit tant En Normandie. HYPERMNESTRE. Écoutez celui-ci, il vous fera trembler. Elle met sa main sur l'autel. Air : Charivari.Malgré le respect sincèreQue j'ai pour toi,Si je ne venge mon père,Hymen fais-moi Manquer de foi dès aujourd'huiÀ mon mari. DANAÜS. En vérité, voilà un terrible serment ! Il lui présente un poignard. Air : Contre un engagement.Du plus funeste sortMa tête est menacée,Pour empêcher ma mort Va percer... HYPERMNESTRE. Qui ? DANAÜS. Lyncée. HYPERMNESTRE. Quelle loi sanguinaire,Hélas, m'imposez-vous !Me convient-il, mon père,De tuer mon époux ! DANAÜS. L'ombre de Gélanor m'a prédit tantôt qu'un des fils d'Égyptus me ravirait la vie, et la couronne. Vos soeurs n'ont pas fait tant de difficulté, elles sont bien plus résolues que vous. Air : Quand on a prononcé ce malheureux ouiElles vont dans la nuit m'immoler mes victimes. HYPERMNESTRE. Hélas ! DANAÜS. Vous soupirez ! Vos soupirs sont des crimes...Vous balancez encor ! Qui peut vous arrêter ?Votre serment vous lie, allez l'exécuter... Hé bien, que ne partez-vous ? Air : Tarare ponpon.Lorsque ma volonté, ma fille, se déclare,C'est à vous de répondre à mon intention. HYPERMNESTRE. Serais-je assez barbare ! DANAÜS. Obéissez-moi donc. HYPERMNESTRE, en s'en allant. Mon cher père tarare, Pompon. SCÈNE XII. DANAÜS, seul. Va, va, j'ai pris se si justes mesures que Lyncée ne pourra se soustraire à ma fureur. La nuit favorisera mon projet. Air : Quand on tient de ce jus d'octobre.J'ai su m'assurer ma vengeance.En vain l'amour retient tes coups,On va dans l'ombre et le silence,Partout assiéger ton époux. SCÈNE XIII. HYYPERMNESTRE, seule avec un poignard Le théâtre change et représente la façade du palais de Danaüs, une nuit très obscure règne sur le théâtre. Air : Depuis que j'ai vu Nanette.Justes dieux ! Que dois-je faire ?Quoi ! cédant à son courroux,Mes soeur par l'ordre d'un pèreAssassinent leurs époux.Ô nuit de tes voiles sombres Quel est le fatal secours ?Toi qui ne devais tes ombresQu'au triomphe des amours. SCÈNE XIV. Lyncée avec une lanterne sourde, Hypermnestre. LYNCÉE. Où diable trouverai-je ma femme ? Je la cherche partout... Si je ne me trompe, je crois que c'est vous, ma mignonne ? Air : J'ai fait à ma maîtresse.Doux objet de ma flammeJe vous retrouve enfin... Il aperçoit le poignard.Mais, que vois-je ?... Ma femme,Quel est votre dessein ?Cet instrument, ma mie,N'est guère de mon goût.N'auriez-vous point envie De faire un mauvais coup ? HYPERMNESTRE. Que lui dirai-je ?... Croyez-moi, Lyncée, éloignez-vous de ces lieux, fuyez-moi de grâce. LYNCÉE. Moi vous fuir !... Vous n'y pensez pas. Air : La verte jeunesse.Par ma foi j'ignorePour quelle raison,Je ne suis encoreMari que de nom. Il faudrait, Madame,À vous parler net,Pour quitter ma femme,L'être tout à fait.Mais que veut dire ceci ? Vous me parlez par énigme, expliquez-vous mieux. HYPERMNESTRE. Air : Pour passer doucement la vie.Pour sauver un époux que j'aime, Fer fatal à toi j'ai recours,Ne sert qu'à m'immoler moi-même,Mourons pour conserver ses jours. LYNCÉE, l'arrêtant. Air.Turlututu rengaine, rengaine,Rengaine ton couteau. Que diable voulez-vous faire ? Air : Je n'saurais.Quoi, tu prétends, assassine,Te percer de part en part ? HYPERMNESTRE. Ma vertu m'y détermine,Mon cher, rends-moi ce poignard. LYNCÉE. Je n'saurais, S'il entrait dans ta poitrine,Tu mourrais. Le tonnerre gronde, les éclairs brillent. Air : À la façon de Barbari.Mais quel tonnerre, quels éclairsÉtonnent la nature !Ces feux qui brillent dans les airs Sont d'un sinistre augure. CHOEUR DES FILS D'EGYPTUS. Quelle funeste trahison,La faridondaine,La faridondon !Dieux, ô dieux ! on nous traite ici Biribi,À la façon de BarbariMes amis. LYNCÉE. Air : Joconde.Quelles voix implorent les dieux !Quels transports sanguinaires ! Je n'en doute plus, dans ces lieux,On égorge mes frères.Secourons-les... dois-je souffrirLeur sanglante défaite...Mais à quoi bon les secourir Lorsque l'affaire est faite ?Il vaut autant que je reste ici. SCÈNE XV. Troupe d'Égyptiens, les susdits. UN ÉGYPTIEN. Air.Aux armes, camarades,L'ennemi n'est pas loin. LYNCÉE. Courons tous au vin. L'ÉGYPTIEN. Aux armes, camarades, Mettons tous l'épée à la main. CHOEUR DES ARGIENS, derrière le théâtre. Air : Je suis un bon soldat.Portons dans le combat,Titata,L'horreur et le carnage.Que Lyncée abattu Tututu,Cède à notre courage. LYNCÉE. Comment morbleu ! On parle de moi. Ah ! Chien de beau-père, vous faites donc des vôtres ! Tout à l'heure nous allons voir beau jeu : mes amis commencez toujours. HYPERMNESTRE. Où allez-vous donc, mon cher époux ? LYNCÉE. Je vais boire un coup. Lyncée sort. On sonne la charge, le combat se fait entre les Égyptiens et les Argiens. À la fin, Lyncée arrive avec un grand bâton et les repousse. SCÈNE XVI. HYPERMNESTRE, seule. Air : Flon, flon.Quelle horreur ! Quel tapage !Où porter mes regards !Le sang dans ce carnage Coule de toutes parts. Air : Un Cavalier d'une riche encolure.Mais quel spectacle à mes yeux se découvre ?La terre s'entrouvre,Je vois des enfersLes supplices divers. Air : Ne craignez rien, l'Hymen est votre asile.Je vois mes soeurs sur l'infernale rive...Quel est le but de leurs soins empressés ?Elles voudraient d'une onde fugitiveFixer le cours dans des tonneaux percés. Air : Je ne suis né ni roi, ni prince.Non, vos mains sont trop criminelles, Des dieux, n'espérez pas, cruelles,Apaiser le juste courroux.Vous puisez vainement, perfides,Vous avez tué vos époux,Vos tonneaux seront toujours vides. SCÈNE XVII. Lyncée victorieux, Hypermnestre. LYNCÉE. Air : Il faut quand l'Amour nous presse.Décampons avec vitesse,Suivez-moi, mon petit coeur.Du combat je reviens vainqueur :Belle Princesse,Ma foi l'on a bien du bonheur Quand on adresse. Il aperçoit Danaüs soutenu par deux gardes.Mais que vois-je ! Vous verrez que j'aurais tué le beau-père. SCÈNE XVIII. Danaüs soutenu par des gardes, Hypermnestre, Lyncée. HYPERMNESTRE. Fin de l'air : Réjouissez-vous bons Français.Grands dieux ! quel horrible spectacle !Ta main vient d'accomplir l'oracle. DANAÜS. Air : Colin va t'en dire à Nanon.Non, fille perfide, c'est toiQui trahis ton père et ton Roi Pour l'amour de ce misérable.Je voudrais pouvoir avec moiTous deux vous entraîner au diable. LYNCÉE. Allez-y toujours devant, mon cher papa. Air : Et zeste, zeste, zesteGrands dieux, quelle fureur ! DANAÜS. Vite que l'on m'emporte. LYNCÉE. La rage le transporte. HYPERMNESTRE. Il expire, Seigneur...Ô ciel quel coup funeste !Il ne faut pas quitter le Roi. LYNCÉE. Et zeste, zeste, zeste, Puisqu'il est défunt, croyez-moi,Songeons au reste. ==================================================