******************************************************** DC.Title = LES TENTATIONS D'ANTOINE, MONOLOGUE. DC.Author = NORMAND, Jacques DC.Creator = FIEVRE, Paul DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Subject = Comédie DC.Subject.Classification = 842 DC.Description = Edition du texte cité en titre DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Contributor = DC.Date.Issued content = DC.Date.Created = DC.Date.Modified = Version du texte du 01/02/2021 à 07:00:11. DC.Coverage = France DC.Type = text DC.Format = text/txt DC.Identifier = http://www.theatre-classique.fr/pages/documents/NORMAND_TENTATIONSDANTOINE.xml DC.Source = http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k207939j DC.Source.cote = DC.Language scheme = UTF-8 content=fr DC.Rights = Théâtre Classique, (creative commons CC BY-NC-ND) *************************************************************** LES TENTATIONS D'ANTOINE MONOLOGUE 1881. Tous droits réservés. PAR M. JACQUES NORMAND PERSONNAGES ANTOINE. Tiré de "Théâtre de Campagne. Troisième série". 1881. pp 151-157. TENTATION D'ANTOINE [ANTOINE]. À E. Delannoy. Antoine est mon nom de baptême : C'est un nom comme un autre fait, Nom qui ne dit rien par lui-même, Ni long, ni court ; ni beau, ni laid. C'est effacé, c'est terne... Antoine... Un homme portant ce nom-là Doit tenir à la fois d'un moine, De John Falstaff et de Pança. Eh bien ! Non, non ! - Car, au contraire, Antoine est un nom dépravé Qui cause à son propriétaire Tous les tourments d'un réprouvé ! Ce nom a des vertus magiques, Et tout homme qui l'a porté De tentations diaboliques Fut sans cesse persécuté ! Ô supplice ! Ô longue souffrance ! Nom fatal, à jamais maudit, Dont l'inévitable influence Partout, toujours me poursuivit ! À peine au début de la vie, Quand je marchais sur les genoux, Pour une assiette de bouillie J'avais déjà des désirs fous ; Je voulais quand même chacune Des choses qui frappaient mes yeux : Pour n'avoir pu prendre la lune, J'eus des désespoirs furieux. À quinze ans, captif des écoles, Je ne rêve que liberté, Galons, plumets et bottes molles, Moustache en croc, sabre au coté ! À vingt ans, mes désirs en flamme Me causent des tourments affreux : Je n'aperçois pas une femme Sans en devenir amoureux. Depuis vingt ans jusques à trente, Sans répit, sans exception, Tout ce qui peut tenter me tente : Je vis dans la tentation ! Tentation de ta richesse, Surtout quand je n'ai plus un sou ! Quand je suis fou, de la sagesse ! Quand je suis sage, d'être fou ! Tentation d'air, de verdure, Quand je suis à Paris l'été ! Tentation d'avoir voiture, Lorsque par terre il fait crotté ! Tentation de dinde grasse Dans l'étalage éblouissant Joignant ses pattes avec grâce Comme pour prier le passant ! Tentation d'être ministre Ou colonel de cuirassiers : Parfois, tentation sinistre D'étrangler tous mes créanciers !... Enfin, un jour dans ma cervelle Naquit, hélas ! Pour mon malheur, Une tentation nouvelle Que je maudis du fond du coeur ! Garçon, je voulus prendre femme : L'affaire se fit promptement ; J'étais alors tout feu, tout flamme, Je brûlais comme un vrai sarment. Ma fiancée était aimable, Mon beau-père semblait parfait, Ma belle-mère... supportable : Je serais heureux tout à fait ! Mais Le lendemain de la noce Par un brusque revirement, Ma femme me parut atroce, Mon beau-père un être assommant, Ma belle-mère une harpie... Bref, tout penaud de la leçon, Depuis lors, je n'ai qu'une envie : Pouvoir redevenir garçon ! Ma femme est rêche, acariâtre, Et parfois je me suis senti Des tentations de la battre... Qui n'ont pas encore abouti ! Mais il faudra que j'y succombe, Car c'est une fatalité Pour moi d'être, jusqu'à la tombe, Tenté, tenté, toujours tenté ! Antoine ! Antoine! Ah ! quelle chaîne ! Quel fardeau ! J'aurais pu si bien M'appeler Chrysostôme, Arsène, Ou simplement Sébastien ! Non ! Non ! Sans rien vouloir comprendre, Sans profits comme sans raisons, C'est ce nom-là qu'iLs s'en vont prendre Entre quinze mille autres noms ! Pour rompre ce lien funeste Et conjurer le mauvais sort, Hélas ! Un seul moyen me reste: La mort ! La mort ! Vienne la mort ! Mais qui sait ? Voudrai-je la suivre ? N'aurai-je pas tentation Près de mourir, de vouloir vivre Par esprit d'opposition ? "La Tentation de Saint-Antoine" est un thème artistique foisonnant. Voir la nouvelle de Gustave Flaubert (1874) Ô mon patron ! Ô moine austère, Toi qui, si doucement tenté, As su rester. célibataire, Protège-moi, par charité ! Guéris-moi du mal qui me blesse Quel que doive être le moyen... Fût-ce de traîner à la laisse Un compagnon comme le tien ! Et vous tous, je vous en supplie, Par ce tourment que j'ai souffert, Tourment affreux, qui de ma vie, A fait un véritable enfer, Par l'expérience tardive Qu'en eut l'Antoine que voilà... Si jamais un fils vous arrive, Ne lui donnez pas ce nom-là ! ==================================================