******************************************************** DC.Title = COMPLIMENT pour l'ouverture du Théâtre Italien, le 7 Avril 1750. DC.Author = ROY, Pierre-Charles DC.Creator = FIEVRE, Paul DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Subject = Compliment DC.Subject.Classification = 842 DC.Description = Edition du texte cité en titre DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Contributor = DC.Date.Issued content = DC.Date.Created = DC.Date.Modified = Version du texte du 26/04/2020 à 14:26:08. DC.Coverage = France DC.Type = text DC.Format = text/txt DC.Identifier = http://www.theatre-classique.fr/pages/documents/ROY_COMPLIMENT7AVRIL1750.xml DC.Source = DC.Source.cote = DC.Language scheme = UTF-8 content=fr DC.Rights = Théâtre Classique, (creative commons CC BY-NC-ND) *************************************************************** COMPLIMENT pour l'ouverture du Théâtre Italien, le 7 Avril 1750. PERSONNAGES MONSIEUR MIRACLE. LA MARQUISE. MADEMOISELLE ASTRAUDY. Extrait du Mercure de France, juin 1750, premier volume. pp 200-207. COMPLIMENT DU 7 avril 1750 Ce Compliment, ainsi que celui qui se trouve dans le dernier Mercure, a été composé par M. Roy. SCÈNE PREMIÈRE. La Marquise, Monsieur Miracle. MONSIEUR MIRACLE. D'un comique pareil se peut-on affoler ? LA MARQUISE. À mes goûts passagers ne mettez point d'obstacle. MONSIEUR MIRACLE. Les miens qui m'ont mis au pinacleSont fixes, sont des lois. Voulez-vous exceller ?Êtes-vous mon élève ? Il faut me ressembler. LA MARQUISE. Quand je dois composer, vous êtes mon Oracle.Pour mes amusements, mon cher Monsieur Miracle,Mon choix, fantasque ou non, vaut-il de quereller ? MONSIEUR MIRACLE. Le bon air jusques-là peut il se ravaler ?[Note : La relâche des spectacles durait du carême à Pâques. En 1750, la relâche dura du 17 mars au 7 avril.]Après un mois d'absence, affamé de spectacle, Est-ce aux Italiens qu'on vient se régaler ? LA MARQUISE. Voulant me réjouir, où fallait-il aller ? MONSIEUR MIRACLE. Chez les Français, morbleu : le succulent Tragique,Farci de sentiments, et fort de politique ;Le haut Comique assaisonné De morale et de pathétique,Voila des aliments pour un goût raffiné.Ici quel est le mets délicat, ou solide ?C'est l'ombre d'un repas ; on en sort toujours vide,C'est du sec, c'est du vent, de la mousse, des riens. LA MARQUISE. Soit, j'ai moins d'appétit que vous, je soutiensQue ce que vous nommez le plus léger service,Est celui qui souvent amène la gaîté. MONSIEUR MIRACLE. Ici le fruit est mal monté.Qu'ils sont gauches vos gens d'office ! LA MARQUISE. Vous en voulez de loin à ces pauvres acteurs. MONSIEUR MIRACLE. Souvent j'ai pris contre eux la défense des moeurs,Car j'en ai. LA MARQUISE. Sur ce point chacun vous rend justice. MONSIEUR MIRACLE. N'a t'on pas vu souvent ces ineptes farceurs,[Note : Batelage : Emploi métaphorique. Allées et venues incessantes.]Mauvais singes en tout, par leurs froids batelages Dégrader, disloquer les plus grands personnages,Des Grecs et des Romains, des Rois, des Empereurs ;Avec de fausses couleursDéfigurer les ouvragesDes plus célèbres auteurs, Dont le public devrait encenser les images ? LA MARQUISE. Mais de ces illustres rimeursLa parodie a-t-elle excité les clameurs ?En ont-ils éprouvé du déchet à leur gloire ?[Note : Agnès de Chaillot, comédie de Biancollelli (1723). C'est la parodie d'Inès de Castro d'Antoine Houdard de la Motte.]Non, l'Agnès de Chaillot chez plus d'un curieux De la tragique Inés rafraîchit la mémoire :C'est Castor et Pollux, ces jumeaux si fameuxImmortels l'un par l'autre. M. AMiracle. Ah ! Quel blasphème affreux ! LA MARQUISE. Calmez-vous : à présent on fait des tragédiesPortant en soi leurs parodies ; Et le Théatre ItalienChargerait sans ajouter rien.Mais son silence aux auteurs dramatiquesÉpargne-t'il les plus âpres critiques ? .Qu'y gagnent ces Messieurs ? Au fond des cabinets, Des feuilles périodiquesVont remplacer les sifflets :Un instant, au théâtre, eût fait couler ces traits :Mais le lecteur, à tête reposée,Savoure l'analyse avec art composée ; Il y voit relever jusqu'aux moindres erreurs :Le public détrompé, rétracte des suffragesMendiés à genoux chez tant de protecteurs,Ou payés par avance à des clients à gages. MONSIEUR MIRACLE. Mais on peut riposter à ces malins écrits ; On arme sa cabale, on partage Taris :L'Italien déclare une plus rude guerre ;Plaide-t-on contre le parterre ? LA MARQUISE. Un Phénix tel que vous ne craindra rien de lui MONSIEUR MIRACLE. Je le sais, mais enfin ce lieu choque ma vue. LA MARQUISE. C'est pour le Compliment que j'y viens aujourd'hui. MONSIEUR MIRACLE. J'ai tant d'aversion pour ce séjour d'ennui,Que j'évite toujours de passer dans la rue.Mais le Compliment fait, je sors. LA MARQUISE. Quoi, vous me laisseriez ? MONSIEUR MIRACLE. Je pars, ou je m'endors. Commence-t-on bien tôt ? LA MARQUISE. Oui, l'Orateur s'avance. MONSIEUR MIRACLE. Comment ? C'est une fille ! LA MARQUISE. Oui : la jeune Astraudy. MONSIEUR MIRACLE. Vous vous moquez. Quoi, l'Éloquence.Ici tombe en quenouille ! LA MARQUISE. Un peu de patience :Un pareil choix est souvent applaudi. SCÈNE II. Mademoiselle Astraudy, La Marquise, Monsieur Miracle. LA MARQUISE. Bonjour, ma chere enfant, je vous donne audience ;Et Monsieur, qui n'a rien de comparable à lui. MONSIEUR MIRACLE, à Mademoiselle Astraudy. Comment ! Elle a des yeux, un fort joli visage.Avez-vous de l'esprit ? MADEMOISELLE ASTRAUDY. Monsieur, c'est notre usageD'emprunter celui d'autrui. MONSIEUR MIRACLE. Le vôtre vaut mieux, je gage. MADEMOISELLE ASTRAUDY. Vous me flattez. MONSIEUR MIRACLE. Non, c'est de bonne foi.Ce qu'on vous a prêté sera, comme je crois,De quelque auteur chétif le doucereux langage.Mignonne, viens demain me haranguer chez moi. Il sort. MADEMOISELLE ASTRAUDY. À quelle heure, Monsieur ? SCÈNE III. La Marquise, Mademoiselle Astraudy. MADEMOISELLE ASTRAUDY. Oh ! le plaisant visage ! Il fait mal le Seigneur. LA MARQUISE. Vous savez donc qui c'est ? MADEMOISELLE ASTRAUDY. Qui ne le connaît pas ? LA MARQUISE. C'est un grand personnage,Il a quelques écarts, et c'est par là qu'il plaît.Je crois qu'il est parti. MADEMOISELLE ASTRAUDY. J'apprêtais son éloge. LA MARQUISE. Pour moi je demeure ici. Comme Muse, Dieu merci,Je pourrai figurer seule dans une loge. MADEMOISELLE ASTRAUDY. Vous êtes Muse : Eh bien, Madame, donnez-nousDans vos moments perdus quelque nouvelle pièce. LA MARQUISE. Ce théâtre est joli, mais déroge à noblesse : Les auteurs sont honteux de travailler pour vous ;Ils semblent se cacher sous terre ;Contents que de l'ouvrage on sente la valeur,Ils ne font point crier du milieu du parterre,L'auteur, qu'on nous montre l'auteur ! Elle sort. SCÈNE IV. MADEMOISELLE ASTRAUDY. Messieurs, soit écrivains connus, soit anonymes,Qui pourront réussir à votre amusement,Tous les choix égalementNous paraîtront légitimes.Je suis encor bien loin du fin discernement ; Mon âge est ma première excuse ;Et ce n'est point ma voix qui reçoit ou refuseCe qu'on vient présenter à notre jugement.Vous m'apprendrez à m'y connaître,Et les comédiens les plus accrédités , Ou d'eux-mêmes plus entêtés,Ne trouvent point de meilleur maître.Vos bontés cette année ont surpassé nos voeux,Et depuis que la troupe est introduite en France,On ne se souvient pas d'un succès plus heureux. Le zèle s'accroîtra par la reconnaissance.Si l'avenir le plus douxM'offre de belles années,Je ne les veux que pour vous ;Vos suffrages, seul bien dont mon coeur est jaloux, Rempliront mes destinées ;Eh ! Quelle autre conquête aussi chère pour nous ! ==================================================