******************************************************** DC.Title = UN CERCLE VICIEUX, SAYNÈTE. DC.Author = MOINAUX, Jules DC.Creator = FIEVRE, Paul DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Subject = Saynète DC.Subject.Classification = 842 DC.Description = Edition du texte cité en titre DC.Publisher = FIEVRE, Paul DC.Contributor = DC.Date.Issued content = DC.Date.Created = DC.Date.Modified = Version du texte du 21/12/2021 à 14:25:03. DC.Coverage = France DC.Type = text DC.Format = text/txt DC.Identifier = http://www.theatre-classique.fr/pages/documents/MOINAUX_CERCLEVICIEUX.xml DC.Source = https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5718390w DC.Source.cote = DC.Language scheme = UTF-8 content=fr DC.Rights = Théâtre Classique, (creative commons CC BY-NC-ND) *************************************************************** UN CERCLE VICIEUX. 1881. Tous droits réservés. par JULES MOINEAUX, rédacteur de la Gazette des Tribunaux. 8517. - Paris. Imprimerie de Ch. Noblet, 13 rue Cujas. - 1881 PERSONNAGES. LE NARRATEUR. LE PRÉSIDENT. LE PLAIGNANT. Extrait de MOINAUX, Jules, "Les tribunaux comiques", Paris, Chevalier-Marescq éditeur, 1881. pp 339-342 UN CERCLE VICIEUX. LE NARRATEUR. Il vaut mieux faire envie que pitié, dit un proverbe : c'est pour cela sans doute que Savourin, malgré une débine que le Mont-de-piété seul connaissait, acceptait volontiers la réputation d'homme à son aise qu'on lui faisait dans son quartier. Peut-être aussi était-ce pour marier plus aisément sa fille. « Ce père Savourin, disaient les gens de sa connaissance, il ne dit rien, mais il doit avoir le sac ; il est portier dans une bonne maison, il exerce en outre, dans sa loge, l'état de cordonnier ; pas de femme à nourrir, puisqu'il est veuf ; son fils a un bon état en main : peintre en bâtiments ; certainement le bonhomme est à son aise, et sa fille Athénaïs, qui est établie blanchisseuse, ne sera pas une mauvaise, affaire pour l'ouvrier qui la demandera en mariage, »Et voilà comment un jeune perruquier établi en face de la maison de Savourin était arrivé à demander Athénaïs en mariage ; la chose ne fit pas un pli, et le jour de l'hyménée était fixé quand se sont accomplis les faits qui amènent en police correctionnelle le père d'Athénaïs, Athénaïs elle-même et son frère, tous les trois pour avoir porté des coups à l'ex-futur époux (car tout est rompu, comme dans le Chapeau de paille d'Italie). Messieurs, dit le jeune merlan, Mossieu Savourin, qui fait son homme au sac, et n'est qu'un vieux va-nus-pieds... MONSIEUR LE PRÉSIDENT. Oh ! Tâchez de vous exprimer autrement. LE PLAIGNANT. Voilà donc la chose : devant donc nous marier, sa demoiselle et moi, qu'elle me parlait de son amour ; et qu'elle, m'a tapé dessus comme une furie... Enfin, voilà donc que, me trouvant avoir besoin d'une couple de pièces de vingt francs pour m'acheter des affaires pour le mariage, je me dis : Quand on a un futur beau-père dans l'aisance, il n'y a pas de gêne à lui emprunter ça, Je vais donc le trouver et je lui glisse la chose des quarante francs. Il reste tout ébaubi sur le moment et finit par me dire : « Heuh ! Quarante francs... faut que je déplace des fonds ; demain, je vous avancerai ça. - C'est bon, que je dis, ça n'est pas à vingt-quatre heures près. » Vous allez voir ce qui est arrivé. Toute cette famille-là, c'est des fourchettes numéro un ; tout ce que ça gagne ; ça se le fourre sous le nez, dont ils y ont un trou qui leur revient cher d'entretien au bout de l'année, c'est pas pour dire ; j'ai su tout ça après, mais j'aime mieux vous l'expliquer tout de suite. MONSIEUR LE PRÉSIDENT. C'est à désirer et je vous y engage fort ; mais vous n'en prenez guère le chemin. LE PLAIGNANT. Le père Savourin va trouver sa fille et lui dit : « Athénaïs, prête-moi donc quarante francs. » Athénaïs, qui, à ce qu'il paraît, n'avait pas d'argent et ne voulait pas le dire à son père, lui répond : « Je vous les porterai demain. » Elle s'en va chez son frère et lui dit s'il ne pourrait pas lui prêter une pièce de quarante francs. Le frère, qui mange tout, lui aussi, lui répond : « Je te prêterai ça ce soir. » Le voilà donc qui vient me trouver et qui me dit : « Dites donc, beau-frère, vous ne pourriez pas me prêter quarante francs ? Rires bruyants dans l'auditoire.? Ah ! Je ne peux pas, que je lui réponds. - Oh ! Pour quelques jours ; qu'il me fait. - Si c'est pour quelques jours seulement, que je lui dis, je vous les donnerai demain ; venez chez votre père, j'y serai, et vous les aurez. » Le lendemain, je vas chez le père Savourin et je me trouve avec sa fille Athénaïs qui entrait. À peine si j'étais là, que v'là le fils qui arrive. Alors je prends le père Savourin dans un coin et je lui dis tout bas : « Avez-vous les quarante francs ? - Oui, » qu'il répond. Alors il dit à sa fille : « Athénaïs, donne-moi les quarante francs. » Là-dessus, Athénaïs dit à son frère : « Donne donc les quarante francs. » Le frère vient à moi et il me dit : « Avez-vous les quarante francs ? » MONSIEUR LE PRÉSIDENT. Mais les coups ! Arrivez donc aux coups. LE PLAIGNANT. C'est de là qu'ils sont venus, parce que, voyant que c'était une famille de sans le sou, j'ai retiré ma demande en mariage ; c'est donc de là qu'ils sont tombés tous les trois sur moi... MONSIEUR LE PRÉSIDENT. Nous allons entendre les témoins. Les témoins, tous locataires de la maison, confirment, relativement aux coups, les allégations du plaignant ; si bien que Savourin père et fils ont été condamnés chacun à six jours de prison et Athénaïs à cinquante francs d'amende. ==================================================