DE LA FEINTISE

CONVERSATION

XXX.

XCVIII.

AVEC PRIVILÈGE DU ROI.

PAR RENÉ BARY, Conseiller et Historiographe du Roi.

À PARIS, Chez CHARLES DE SERCY, au Palais, dans le salle Dauphine, à la Bonne-Foi couronnée.


© Théâtre classique - Version du texte du 31/01/2024 à 17:22:13.


ACTEUR.

CÉSARION.

MARCELIN.

CERINDE.

FELONTE.

Texte extrait de "L'esprit de cour, ou Les conversations galantes, divisées en cent dialogues, dédiées au Roi.", René Bary, Paris : de C. de Sercy, 1662. pp 191-197.


DE LA FEINTISE

Césarion et Marcelin, traitent de pacifique un brave qui est de leurs amis, afin que Cerinde qui a de l'aversion pour les gens de guerre, puisse souffrir sa recherche.

CÉSARION.

Si l'honneur suivait toujours la bravoure, je condamnerais la demeure perpétuelle que vous faites à la campagne, parce qu'en vous défendant d'aller à la guerre, vous vous défendriez d'aller à la gloire : mais un homme qui n'est point en faveur, n'est guère en estime ; un homme qui n'est point en crédit. n'est guère en réputation. On me dira peut-être que l'exercice de la vaillance est aimable de soi-même, et qu'un bien qui est aimable de soi-même, doit affaiblir toutes les autres considérations. Ces sentiments sont raisonnables, on ne le peut nier : mais si les plus grands héros de l'Antiquité ont eu des fins fastueuses, où trouvera-t-on des Hommes qui soient braves, et qui ne soient pas ambitieux ? Où trouvera-t-on des hommes qui soient du Monde, et qui n'en aiment pas la fumée ?

MARCELIN.

Si l'ambition, comme vous dites, eut été bannie des Anciens, à quoi eussent servi les Couronnes et les privilèges, les Inscriptions et les Triomphes ? Ces remarques nous apprennent que les Hommes sont Hommes, c'est à dire qu'ils sont faibles, et que quelque amour qu'ils aient pour la vertu, ils ont de l'inclination pour la vanité.

CERINDE.

Encore si l'on ne s'appauvrissait point sous tous la cuirasse, je pourrais être la première à blâmer ceux qui ne vont point à l'Armée : mais qui ne sait qu'on est ordinairement mal payé, qu'il faut faire de grandes dépenses, et qu'à moins d'être puissamment riche, il faut de deux choies l'une, ou ruiner sa maison, ou ruiner ses hôtes.

FELONTE, ou le Pacifique supposé.

Comme l'argent est la source de tous les biens, la pauvreté est la source de tous les maux.

CÉSARION.

Quelque état qu'on fasse du courage, on le doit considérer comme un don inhumain.

MARCELIN.

L'on ne peut justement combattre votre proposition, elle est vraie ; les plus grands courages ont été les plus grands bouchers ; et ceux qui ont reçu le plus d'honneur aux villes, ont été ceux qui ont détruit le plus d'hommes à la Campagne.

CÉSARION.

Quand le courage ne serait pas sanguinaire, il ne mériterait pas qu'on en si grand état ; il se trouve souvent chez les personnes les plus viles.

MARCELIN.

Ne parlons plus de la vertu qui fait des plaintifs, parlons de la passion qui fait des contents.

FELONTE.

Je ne sais pas quand l'amour me fera favorable, il y a longtemps qu'il m'est fâcheux.

CERINDE.

La persévérance couronne les services.

MARCELIN.

Ha ! Que cette parole est obligeante !

CÉSARION.

Elle donne de l'espérance.

FELONTE.

Elle donne ce que je n'ai point.

CERINDE.

Ou vous ne connaissez pas vos avantages, ou vous devez aspirer à de grands Partis.

FELONTE.

Je ne combattrai point les louanges que vous me donnez, je respecte tout ce qui vient de vous : mais si je suis ce que vous supposez, je puis donc prétendre quelque part à vos bonnes grâces.

CERINDE.

Vous n'êtes pas malaisé à contenter, c'est ce qui console mes semblables: mais si j'avais à contracter quelque attache, je voudrais que ce fut avecque une personne qui ne dépendit point du son de la Trompette.

CÉSARION.

Monsieur est à votre bienséance, il ne se propose point de faire des veuves.

CERINDE.

Voulez-vous être la caution de ce que vous avancez.

CÉSARION.

Très volontiers.

CERINDE.

Voila de beaux acheminements !

FELONTE.

Tout de bon.

CERINDE.

Je dis ce que je pense.

FELONTE.

Quoi que cette réponse favorablement accompagnée de je ne sais quelle prononciation qui semble ne correspondre pas à l'honneur qu'elle me fait, je la reçois pourtant avecque tant de tendresse, que je n'ai jamais été si agréablement ému.

CERINDE.

Je vois bien que vous êtes extrêmement sensible, et que pour conserver votre vie, il est à propos que je ménage mes faveurs.

MARCELIN.

Croyez-moi, Mademoiselle, résolvez vous à cet obligeante cruauté ; le plaisir lui rendrait un mauvais office.

CERINDE.

Je suivrai votre avis.

FELONTE.

Ha ! Ne le suivez pas. Si je ne meurt de joie, je mourrai de douleur.

 


PRIVILÈGE DU ROI.

Louis par le Grâce de Dieu, Roi de France et de Navarre : À nos âmés et Féaux conseillers les gens tenant nos cours de Parlement, requêtes de notre Hôtel et du Palais, Baillifs, sénéchaux, leurs lieutenants, et tous autres nos officiers et justiciers qu'il appartiendra, salut. Notre cher et bine aimé le sieur RENÉ BARY, nous a fait exposé qu'il a fait un livre intitulé, L'Esprit de Cour, ou les belles conversations, lequel il désirerait faire imprimer, s'il nous plaisait lui accorder nos lettres sur ce nécessaires. À ces causes, Nous lui avons permis et permettons par ces présentes, de faire imprimer, vendre et débiter en tous les lieux de notre Royaume, le susdit livre en tout ou en partie, en tels volumes, marges et caractères que bon lui semble, pendant sept années, à commencer du jours que chaque volume sera achevé d'imprimer pour le première fois, et à condition qu'il en sera mis deux exemplaires dans notre Bibliothèque publique, un ne celle de notre château du Louvre, vulgairement appelé le Cabinet des Livres, et un en celle de notre très cher et féal le Sieur Séguier Chancelier de France, avant de les exposer en vente ; et à faute de rapporter ès mains de notre âmé et féal Conseiller en nos conseils, Grand Audiencier de France, en quartier, un récépissé de notre Bibliothèque, et du sieur Cramoisy, commis par nous du chargement de la délivrance actuelle desdits exemplaires, Nous avons dès à présent déclaré ladite permission d'imprimer nulle, et avons enjoint au syndic de faire saisir tous les exemplaires qui auront été imprimés sans avoir satisfait les clauses portées par ces présentes. Défendons très expressément à toutes personnes, de quelque condition et qualité qu'elles soient, d'imprimer, faire imprimer, vendre ni débiter le susdit livre en aucun lieu de notre désobéissance durant ledit temps, sous quelque prétexte que ce soit, sans le consentement de l'exposant, à peine de confiscation de ces exemplaires, de quinze cent livres d'amende, et de touts dépends, dommages et intérêts. Voulons qu'aux copies des présentes collationnées par l'un de nos âmés et féaux conseillers et secrétaires du Roi, foi soit ajoutée comme à l'original. Commandons au premier notre Huissier ou sergent sur ce requis, de faire pour l'exécution des présentes tous exploits nécessaires, sans demander autre permission ; Car tel est notre bon plaisir ; nonobstant oppositions ou appellations quelconques, Clameur de Haro, Charte Normande, et autres lettres à ce contraires. Donné à Paris le quinzième jour de décembre, l'an de grâce mille six cent soixante et un, et de Notre règne le dix-neuvième. signé, par le Roi en son conseil, MOUsTIER, et scellé du grand sceau de cire jaune.

Registré sur le livre de la Communauté le 10 , mars 1662, suivant l'arrêt de la Cour de Parlement du 8 avril 1653. signé DEBRAY, syndic.

Ledit sieur BARY a cédé et transporté son droit de privilège à Charles de Sercy Marchand Libraire à Paris, pour en jouir suivant l'accord fait entre eux.

Achevé d'imprimer pour la première foi le 24 jour de mars 1662. Les exemplaires ont été fournis


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